Maarten Clinckaert (Siemens Healthineers) : « syngo Virtual Cockpit est un logiciel qui permet de contrôler jusqu’à trois scanners IRM à distance. L’examen peut ainsi être réalisé depuis n’importe quel endroit et plus nécessairement à partir de la console située à côté du scanner. »
Métier en pénurie
Une même personne pourrait donc réaliser plusieurs IRM, sans avoir à se déplacer d’un campus à l’autre. Voilà qui permettrait de faire face au manque de personnel. « L’imagerie médicale est un métier en pénurie », admet Maarten Clinckaert.
« Les hôpitaux sont parfois contraints de débrancher leurs scanners, car ils n’ont pas assez de personnel pour les faire fonctionner. Avec des temps d’attente encore plus longs à la clé. »
« Et ce n’est pas près de s’améliorer : la demande de scanners augmente partout dans le monde, mais l’offre ne suit pas. Les hôpitaux sont parfois contraints de débrancher leurs scanners, car ils n’ont pas assez de personnel pour les faire fonctionner. Avec des temps d’attente encore plus longs à la clé. »
Shopping IRM
Évoquons également le phénomène de « shopping IRM » : les patients prennent un rendez-vous pour un scanner, puis tentent d’obtenir un service plus rapide dans un autre hôpital. Lorsqu’ils y parviennent, ils « oublient » souvent d’annuler leur premier rendez-vous.
Maarten Clinckaert : « Avec syngo Virtual Cockpit, le lieu où est pratiqué l’examen et où se trouve le patient n’a plus d’importance. Grâce aux caméras placées dans la salle d’imagerie et sur la pompe de contraste, le technologue en imagerie médicale, appelé “pilote”, garde à tout moment une vue sur l’appareil et l’injection du produit de contraste. »
« L’opérateur peut partager son écran et demander l’avis d’un médecin. Le patient n’est évidemment pas livré à lui-même. Un “patient manager” (technologue médical ou infirmier) reste à ses côtés pendant toute la durée de l’examen, afin de le mettre à l’aise et de veiller au bon déroulement du scanner. »
Fondement scientifique
AZ Delta, en collaboration avec UZA, a été le premier hôpital de notre pays à adopter la solution. Les hôpitaux GZA les rejoignent à présent. À AZ Delta, tout se passe en étroite collaboration avec le centre d'apprentissage et d'innovation RADar, qui est responsable de la base scientifique.
AZ Delta : former le personnel en continu
Dr Kristof De Smet, chef du service de radiologie : « L’AZ Delta possède trois scanners IRM sur ses deux campus de Roulers. Grâce au cockpit virtuel, nous commandons désormais ces appareils de manière centralisée, depuis le campus principal. Nous réalisons au maximum deux examens en même temps, jamais trois. »
« Le technologue en imagerie médicale est toujours accompagné d’une personne en formation. C’était pour nous la principale raison d’acquérir le système : les collaborateurs bénéficient d’une formation continue et peuvent ainsi effectuer des examens de plus en plus complexes, tels que l’IRM cardiaque. Nous optimisons ainsi le niveau de connaissances de notre personnel. »

« Nous n’utilisons donc pas ce cockpit virtuel pour économiser sur le personnel », insiste le Dr De Smet. « Il y a toujours un technologue en imagerie médicale auprès du patient et dans le cockpit. Tout le monde alterne entre les deux tâches, afin de ne pas perdre le contact avec la pratique du scanner. »
« Nous avons également revu la planification : il n’est plus nécessaire de changer de rôle toutes les cinq minutes. Le fait que les collaborateurs puissent se concentrer pleinement et plus longuement sur une seule tâche apporte une vraie valeur ajoutée, tant pour l’expérience client que pour la qualité de l’imagerie. »
La planification, un gage de sécurité
N’est-il pas risqué de réaliser plusieurs examens en même temps ? « C’est une bonne question », tempère Maarten Clinckaert. « La réponse réside dans la planification. L’IRM diffère totalement d’un examen tomodensitométrique (CT). Le CT présente un temps d’acquisition (temps nécessaire pour obtenir les images) plutôt court. Pour l’IRM, il faut compter plusieurs minutes, voire une demi-heure par séquence. »
« Il faut donc bien planifier. Veillez à ce que les examens que vous pratiquez simultanément en tant que pilote soient compatibles. Évitez, par exemple, de combiner deux IRM cardiaques, car le scanner du cœur est très exigeant. Une bonne gestion du planning vous permettra de proposer une qualité de service équivalente, parfois même supérieure. »
Concilier l’offre et la demande
Si le scanner à distance se pratique déjà entre les différents campus de l’AZ Delta, il pourrait aussi être mis en œuvre entre différents hôpitaux.
« Par l’intermédiaire de notre projet pilote WeScan qui débutera prochainement, nous entendons nous profiler en intermédiaire pour les services d’imagerie », avance Maarten Clinckaert. « Notre système concilie l’offre et la demande, indépendamment de l’emplacement de l’appareil ou de l’identité du fabricant. »
« Supposons que l’hôpital A soit spécialisé dans l’IRM de la prostate. Le patient peut alors passer sous le scanner de l’hôpital B, tandis que l’imagerie est réalisée par l’expert de l’hôpital A. Il en va de même pour les hôpitaux en manque de personnel ou les services d’urgences, qui peuvent faire appel à la plateforme pour assurer la continuité du service. »
« Cela va dans les deux sens : votre hôpital est tantôt client, tantôt fournisseur. »
« Cela va dans les deux sens : votre hôpital est tantôt client, tantôt fournisseur. Les soins deviennent plus abordables, car le patient ne doit plus se déplacer aussi loin et ne doit plus attendre aussi longtemps pour passer un scanner. Les connaissances et les expériences sont mises en commun, ce qui profite bien entendu aussi au patient. »
Score de fiabilité
Rien ne change en principe pour le radiologue, qui continue à recevoir les images et à suivre les protocoles comme à l’accoutumée. Tout dépend évidemment de la fiabilité du technologue en imagerie médicale… Cette personne que vous ne connaissez pas, mais qui réalise des scanners pour vous.
« À l’image d’Uber ou Booking, nous envisageons de mettre en place une sorte de qualification objective », explique Maarten Clinckaert. « Vous pourriez ainsi vous assurer, sur la base d’un score, que l’opérateur dispose de l’expérience et de l’expertise requises. »
Le projet pilote avec l’AZ Delta et un deuxième hôpital, qui souhaite rester discret pour l’instant, débutera en novembre. Dans l’intervalle, l’équipe doit encore clarifier pas mal de questions, notamment juridiques et financières, mais aussi en matière d’assurance.
« Il s’agit d’organiser le moyen », nuance le Dr De Smet de l’AZ Delta, « mais nous ne devons pas perdre de vue notre principal objectif, qui est d’améliorer l’accessibilité aux soins de santé. »
« Compte tenu de la pénurie de personnel qui ne cesse de s’aggraver et de la demande de soins qui ne cesse d’augmenter, des solutions pourraient bien être nécessaires plus tôt qu’on le pense. »
« Nous devons prendre les mesures qui s’imposent pour continuer à remplir notre mission sociale. Compte tenu de la pénurie de personnel qui ne cesse de s’aggraver et de la demande de soins qui ne cesse d’augmenter, des solutions pourraient bien être nécessaires plus tôt qu’on le pense. La bonne nouvelle, c’est que la technologie existe déjà et que nous allons tester les formes de collaboration les plus appropriées. »
« Le projet suscite beaucoup d’intérêt de la part d’hôpitaux qui possèdent plusieurs campus, mais aussi de réseaux hospitaliers. Ceux-ci sont confrontés à des défis organisationnels majeurs, que ce type de technologie peut aider à relever », se réjouit Maarten Clinckaert.
Autres types de scanner
Maarten Clinckaert : « Est-il possible de réaliser d’autres examens à distance, par exemple un CT-scan ou un examen de médecin nucléaire, en parallèle des IRM ? D’un point de vue technique, oui. D’un point de vue juridique, cela reste un point d’interrogation. Les rayons X doivent, par exemple, obligatoirement être lancés sur place. En raison des temps d’acquisition courts, le patient manager devrait alors appuyer en permanence sur des boutons. »
« Le système peut néanmoins être utile pour le CT-scan dans les situations d’urgence, dans le cadre de la formation et lorsque l’avis d’un expert est requis. Si le modèle utilisé pour les scanners IRM s’avère viable, nous ne manquerons pas d’évaluer à quels autres examens le scanner à distance peut apporter une valeur ajoutée. »