Cher Steven, beMedTech prône-t-elle un remboursement de l’utilisation de certaines apps médicales par l’assurance maladie ? Oui, vous avez bien lu ! C’est la question que nous a posée un journaliste en janvier dernier, dans la foulée de la publication du rapport du KCE.
Retour en arrière
Remontons le temps jusqu’en 2016, à l’époque du coup d’envoi de 24 projets pilotes consacrés à la santé mobile, également appelée « m-health ». La m-health était alors un sujet relativement récent dans le paysage international des soins de santé. Nous étions tous excités à l’idée que les patients et les prestataires de soins belges commencent à utiliser des apps médicales au quotidien.
Lorsqu’il s’est avéré que l’utilisation d’apps pouvait apporter une valeur ajoutée dans de nombreuses situations, une question a logiquement suivi : à quand le financement des apps médicales par l’INAMI ? Au moins un journaliste nous a posé cette question à raison d’une fois par mois pendant deux à trois ans. Chaque fois, nous devions nous résoudre à répondre que beMedTech se posait la même question.
Appuyons à présent sur « avance rapide » pour revenir en janvier 2023. Plus de six (!) ans après le lancement des projets pilotes de m-health, on nous demande si nous sommes favorables à un financement officiel par l’INAMI de certaines apps médicales… Comme si le temps s’était figé pendant toutes ces années !


Apprendre à patiner
Le journaliste n’est bien sûr pas à blâmer. Sa question met toutefois en lumière un problème sous-jacent dans notre système de soins de santé. Dans les domaines où nous bénéficions d’une assise solide, nous osons à juste titre expérimenter des moyens d’apporter plus rapidement l’innovation aux patients et aux prestataires de soins. Citons, par exemple, les procédures d’accès anticipé et rapide à de nouveaux médicaments prometteurs. En revanche, lorsque nous évoluons en terrain glissant, nous nous cramponnons à la rambarde. Ce qui n’est pas nécessairement la meilleure stratégie pour apprendre à patiner.
De nombreuses applications de santé numériques ont pourtant déjà largement démontré leur valeur ajoutée. Dans le domaine de la santé mobile, mais aussi dans le domaine des thérapies numériques et des systèmes d’aide aux décisions cliniques (cliquez ICI pour en savoir plus sur ces trois domaines). Plusieurs pays encouragent déjà leur utilisation, mais pas la Belgique. Malgré un score brillant à l’examen théorique, avec notre pyramide de validation pour la m-health qui nous a valu le statut de pionnier international, nous avons pris la fâcheuse habitude de repousser sans cesse la date de l’examen pratique.
Input, output
Comment l’expliquer ? L’une des principales causes réside dans « le système ». Le financement des soins de santé se concentre principalement sur le début et la fin du programme de soins : quels soins administrons-nous et qu’apportent-ils au patient ? Nous payons pour un input qui améliore l’état de santé du patient.
Les technologies numériques médicales, en revanche, et a fortiori la m-health avec ses applications de télésurveillance, interviennent souvent dans le processus qui se situe entre l’input et l’output. Ces solutions aident les prestataires de soins et les patients à mieux communiquer entre eux, elles fournissent aux prestataires de soins des données qui leur donnent un meilleur aperçu de l’évolution d’une maladie, elles aident les patients à suivre leur traitement avec plus d’assiduité et de précision, etc. Elles ont ainsi un impact positif considérable sur l’output. Notre formule de financement actuelle ne laisse cependant pas de place à l’amélioration de processus ou à des soins plus personnalisés…


Sauter le pas
Nous sommes de plus en plus nombreux à réaliser que nous passons à côté d’opportunités colossales en ne tenant compte que du début et de la fin du programme de soins. Pour améliorer encore l’output pour les patients, nous devons également améliorer les processus intermédiaires. Les Digital MedTechs ont un rôle important à jouer à cet égard.
Le rapport du KCE aidera-t-il les décideurs politiques à sortir de l’impasse actuelle ? C’est possible (en partie), à condition que nous en retirions tous le bon message. Et ce message est non pas que nous devons avant tout nous concentrer sur un cadre d’évaluation totalement neuf (nous avons en effet déjà démontré nos compétences théoriques avec la pyramide de validation) ; mais plutôt que nous devons oser et agir. C’est à l’usage que l’on peut juger de la qualité d’un système. En d’autres termes, l’heure est venue de lâcher la rambarde et de passer à la pratique. Nous pourrons toujours ajuster le cadre théorique en cours de route.
Qu’en pensez-vous ?
Cher Steven, beMedTech prône-t-elle un remboursement de l’utilisation de certaines apps médicales par l’assurance maladie ?
Cher journaliste, vous posez, selon nous, la mauvaise question. Il s’agit avant tout de savoir si les opportunités que recèlent les technologiques numériques médicales valent la peine d’être saisies. Pour nous, la réponse est oui, sans aucune hésitation. Les Digital MedTechs peuvent nous aider à mieux soigner un plus grand nombre de patients et à fournir un encadrement continu aux prestataires de soins. Je vous retourne donc la question : pensez-vous que l’assurance maladie devrait mobiliser des ressources à cet effet ?